Mais d’où vient le goût de bouchon ?

Ne baissez pas la tête, ça arrive à tout le monde ! Eh oui, c’est le risque lorsque l’on achète du vin : qu’il soit “bouchonné”. Mais pourquoi certaines bouteilles sont bouchonnées et pas d’autres ?

Dans cet article je vais décrire et expliquer les facteurs qui nous amène à ce défaut mais je vais également parlé des bouchons en général car dorénavant, d’autres (à vis, plastique ou encore en verre) font leur apparition, notamment dans le nouveau monde.

La récolte

Avant que le liège se retrouve sur vos bouteilles, il y a tout un processus que voici :

On commence par la récolte du liège qui se déroule de mai à août en prélevant l’écorce d’arbre appelé Chêne-liège. Originaire d’Afrique du Nord, il est présent sur notre territoire depuis -6 500 avant JC et prospère aujourd’hui dans des régions comme la Provence, la Corse et le Roussillon : des régions où le climat lui convient.

Son écorce est épaisse de 25 centimètres et repousse après l’avoir coupé. Il faut savoir que dans un premier temps, l’écorce est dite “mâle” et n’a pas les propriétés suffisantes pour en faire des bouchons. En effet, il est crevassé et de moindre qualité contrairement au “liège femelle” prélevé par la suite. Il faut alors “déliéger” (=enlever l’écorce) l’arbre à deux reprises au moins, avant d’avoir un “liège femelle” qui fournira des bouchons de qualité.

On attend que l’arbre est 20-25 ans avant la première récolte, car sa circonférence est de 70 centimètres, suffisante pour le premier démasclage (= Enlever le liège mâle). La repousse dure entre 9 et 15 ans (dépend des régions) et on obtient le premier “liège femelle”. La durée de vie d’un chêne liège est de 150 à 200 ans mais certains vont au delà.

Comment se forment les bouchons ?

Après la récolte, le liège est entreposé à l’air libre pendant un an pour qu’il sèche. L’objectif ici est de débarrasser le liège des insectes, tanins et autres impuretés. Pendant cette phase, on peut observer les planches et apprécier la qualité, celles ayant des défauts majeurs seront retirées avant le démarrage du processus.

  1. Le bouillage

On plonge les planches dans de l’eau à ébullition pendant minimum une heure, les intérêts sont multiples:

  • Nettoyer les planches
  • Extraire les substances hydrosolubles comme certains sels minéraux et tanins
  • De rendre les planches plus souples
  • Augmenter leur épaisseur en réduisant leur densité
  1. Stabilisation

Les planches sont en repos pendant quelques jours (un à trois jours). Comme son nom l’indique, cela va permettre de stabiliser les planches au niveau dimensionnelle. On sélectionne à nouveau les meilleurs planches pour continuer l’aventure.

  1. Tirage en bande, tubage et rognage

Le tirage en bande consiste à découper les planches de façon transversale et ainsi réaliser des bandes. Ces bandes sont ensuite perforées à l’aide d’une tubeuse, une machine permettant de faire des trous d’une dimension précise dans l’épaisseur des planches. Le rognage peut être fait pour égaliser la longueur des bouchons.

(Une tubeuse en action !)
  1. Triage

Un nouveau triage est réalisé pour enlever les bouchons mal découpés ou présentant finalement des défauts qui étaient invisibles auparavant.

  1. Lavage, séchage et colmatage

Lors de cette étape, les bouchons sont lavés et désinfectés afin d’éliminer les micro-organismes indésirables (certains pouvant donner ce fameux goût de bouchon). Puis, le colmatage consiste à remplir les pores de surfaces (lenticelles) avec un mélange de colle et de poudre de liège. L’objectif est d’améliorer l’étanchéité mais aussi l’apparence des bouchons.

  1. Tri de finition et marquage

Les tris sont nombreux dans la procédure ! Celui-ci a pour mission d’affiner les catégories de bouchons en fonction de leur aspect visuel. Ensuite vient le marquage, comme vous avez pu le voir sur certains bouchons, le logo ou nom de domaine peuvent être inscrit dessus : c’est grâce à ce marquage (au feu ou à l’encre) que cela est possible.

  1. Traitement et emballage

Les deux dernières étapes : dans un premier temps on traite le bouchon avec des produits spécifiques à base de paraffine afin de faciliter le futur bouchage/débouchage, cela participe également à améliorer l’étanchéité finale. Les bouchons sont alors finis et il ne reste plus qu’à les emballer et les expédier !

Le défaut du bouchon, quel facteurs ? Pourquoi ?

5% : c’est le chiffre à retenir aujourd’hui. En effet, environ 5% des bouteilles sont touchées par ce défaut qu’est le goût de bouchon. On peut définir le goût de bouchon par une odeur que l’on découvre lors de la phase olfactive de la dégustation et qui se caractérise par une senteur de carton mouillé, de moisi, de poussière. Vous imaginez bien que cela enlève tout les plaisirs auxquels nous nous attendions en ouvrant la bouteille.

Quelles sont les molécules responsables ?

  • 2,4,6 Trichloroanisole ou TCA: Dans 95% des cas, les TCA sont apportés par le bouchon en lui-même.
  • 2,3,4,6 Tetrachloroanisol ou TeCA: Il est responsable des goûts de bouchon sur les vins n’ayant jamais été en contact avec du liège.
  • 2,4,6 Tribromoanisole ou TBA: Il s’agit d’un des plus puissants contaminants identifiés.

La présence de TeCA ou de TBA est la preuve d’une contamination du vin par l’air ou le bois (produits de traitement du bois utilisés par exemple) et le bouchon est en partie (95% des cas) hors de cause. “En partie” car il peut être contaminé avant par les TeCA et TBA. La présence de TCA dans le vin n’est donc pas une preuve suffisante de la culpabilité du bouchon, puisque dans certains cas, les TCA peuvent être apparu avant le bouchon (5%).

Bien entendu, un taux aussi élevé pour des bouteilles dîtes “bouchonnées”, cela fait mal aux affaires de la filière vin. D’autres solutions ont été trouvé pour remplacer le liège…

Capsules à vis, bouchons synthétiques, en verre…

Les capsules à vis ont été introduite dans les années 50 et sont surtout utilisées pour les vins du Nouveau Monde (Australie, Nouvelle Zélande, Chili…). Il n’y a pas de problèmes de bouchon et certains pays comme l’Australie privilégient ce mode de fonctionnement (90% des bouteilles du pays sont fermées avec ce type de capsule).

L’Ancien Monde (France, Espagne, Italie,…) a du mal à s’y mettre car même si cela évite des problèmes, le liège est ancré dans notre histoire. De plus, la capsule à vis souffre, à tort, d’une mauvaise image : beaucoup de consommateurs caractérisent ces vins de basse qualité. Or, si l’on reprend l’exemple de l’Australie où 9 bouteilles sur 10 disposent de la capsule, on s’aperçoit que leurs grands vins ont ces capsules… Alors oui il y aura toujours un éternel débat entre les probouchons et les procapsules pour connaître le meilleur en terme de vieillissement.

Si les bouchons de liège ont fait leurs preuves au cours de l’histoire, il en est tout autre pour les capsules qui reposent sur une histoire plus récente avec moins de recul sur le vieillissement. Par ailleurs, ouvrir une bouteille avec un tire-bouchon est également ancré dans la culture, dévisser une bouteille beaucoup moins.

Bon à savoir : une bouteille avec un bouchon en liège doit se garder couchée afin que le liège reste humide et permette un apport d’oxygène satisfaisant. Une bouteille à capsule peut aussi bien se garder couchée que debout.

Le bouchon synthétique, arrivé dans les années 90, semble être un compromis entre les deux précédents. En effet, ce type de bouchon est fabriqué à partir de plastique alimentaire. Il ne se délite pas lors de l’ouverture et la tradition du tire-bouchon peut perdurer. Il n’y a pas non plus de goût de bouchon: cela semble parfait n’est-ce pas ? Le bémol est qu’il y a encore moins de recul que la capsule à vis concernant la garde des vins. Cette garde peut être discutable compte tenu des composants de ce type de bouchon (polymères). Mais pour des vins à boire dans leur jeunesse, cela pourrait représenter une bonne solution, l’avenir nous le dira !

(Bouchons synthétiques)

Le bouchon en verre… en verre… Oui vous avez bien lu, certains bouchons peuvent être en verre. Une seule entreprise situé en République Tchèque possède les brevets pour les réaliser, sous le nom de Vinolok. Je vous laisse imaginer l’inconvénient qui semble le plus logique : la fragilité. En effet, ce type de bouchon est plus fragile que les autres mais a aussi des atouts.

Premièrement, il est inerte et ne transmet par conséquent aucun goût (odeur de bouchon par exemple), c’est a priori plus respectueux de l’environnement si on se fie à la production et le fait qu’il soit recyclable. Il possède une bonne étanchéité avec le joint de quelques millimètres et est peu perméable à l’air (pas de problèmes d’oxydation ni de défauts gustatifs). Comme la capsule à vis, son joint d’étanchéité le rend hermétique et préserve donc les qualités de fraîcheur des vins de petite garde. Néanmoins, les bouchons en verre sont aussi plus coûteux pour les vignerons et on en voit très peu sur le marché.

Mais que faire si ma bouteille est bouchonnée ?

Vous avez préparé un repas pour vos proches et comme votre caviste vous l’a conseillé, vous avez ouvert la bouteille une heure à l’avance sauf que, tout ne se passe pas comme prévu, l’odeur de bouchon remplit vos narines et c’est la panique. Keep calm…

Certaines astuces pourront vous sauver :

  • Introduire dans la bouteille bouchonnée une feuille de Cellophane d’environ 20 centimètres au préalablement roulée sur elle-même. Cela devrait réduire de 75% le goût de bouchon.
  • Verser le vin dans une carafe: l’oxygénation va permettre au vin de s’aérer et d’atténuer l’odeur de bouchon en favorisant les arômes plus agréable du vin

Par contre, si ladite bouteille n’était pas prévue pour un événement, vous pouvez toujours en faire une marinade pour un bœuf bourguignon par exemple, et ainsi ne pas perdre le vin

En vous souhaitant de futures belles dégustations…

À bientôt.