La viticulture biologique ne leur suffisaient pas, ils souhaitaient aller plus loin. Être plus en accord avec la nature, en la protégeant au mieux, suivre le calendrier lunaire, revitaliser les plantes… Ces vignerons et vigneronnes ont choisi de mener leur domaine sur la voie de la Biodynamie, une voie pas si simple à priori.

Histoire
L’un des personnages importants est sans aucun doute Rudolf Steiner (1861-1925), à qui l’on doit cette approche de l’agriculture. C’est dans les années 1920 que ce philosophe autrichien se posa beaucoup de questions concernant les cultures. Il n’était d’ailleurs pas le seul puisqu’un certain nombre d’agriculteurs étaient, eux aussi, préoccupés par l’état de dégénérescence dans lequel se trouvaient certaines productions agricoles (les pommes de terre, les céréales, les fruits et les légumes)…
Les questions sur lesquelles Rudolf Steiner s’était penchées concernaient l’état des sols après le passage d’engrais et de pesticides ou encore les influences cosmiques. Elles devinrent alors de plus en plus essentielles à ses yeux.
C’est plus précisément en 1924, durant ses conférences devant des agriculteurs allemands, qu’il explique qu’une agriculture différente de celle que l’on employait à l’époque est possible. Se passer des produits chimiques utilisés sur les sols semblait être un pari osé en ces temps, mais un défi accepté par Rudolf Steiner. Il énumère alors ses convictions : le sol est une matière vivante et il faut la préserver en limitant toutes substances chimiques. De par leur emploi, la vie organique des sols disparaissait et l’équilibre était rompu.
Plusieurs agriculteurs adhèrent et cherchent, au fil du temps, à développer ces idées.
En France d’ailleurs, la première ferme à avoir été convertie en Biodynamie était située en Alsace, durant l’année 1925.
Mais ce n’est qu’en 1973 qu’est créé le Syndicat d’Agriculture Biodynamique puis, en 1975 apparaît le Mouvement de Culture Biodynamique. Ces deux associations sont abritées par la Maison de la Culture Biodynamique de Colmar.
Il a fallu du temps avant que la Biodynamie devienne populaire. C’est à partir des années 2000 que son expansion se fait sentir, notamment dans plusieurs régions viticoles : la France, la Suisse, l’Espagne, l’Italie, l’Autriche, l’Allemagne, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Chili, l’Afrique-du-Sud, le Canada et les États-Unis.

Principes
L’équilibre de la vigne ainsi que son environnement sont les deux facteurs les plus importants pour les adeptes de la Biodynamie. Plusieurs objectifs sont recherchés :
- Renforcer la vitalité des plants, tout en améliorant leur résistance face aux maladies et autres indésirables
- Se fier au calendrier lunaire pour mener les différentes tâches à la vigne et durant les vinifications
- Enrichir la vie organique des sols
La Biodynamie est une branche de la viticulture biologique, mais qui repousse encore un peu plus la relation entre l’Homme et la Terre. Elle se différencie par la prise en considération des influences astrales ainsi que du rythme de la nature. Dans notre agriculture actuelle marquée par la course à la plus forte rentabilité et une productivité de plus en plus importante, l’utilisation de substances chimiques est en constante augmentation.
Les défenseurs de la Biodynamie sont de plus en plus nombreux et comptent dans leurs rangs des critiques influents dans le monde du vin : Robert Parker et Jancis Robinson. Le premier est plus connu, on lui doit notamment son célèbre barème (noté sur 100), que l’on peut même apercevoir sur certaines étiquettes. Un bon argument de vente!
Plus qu’un défenseur, il conduit lui-même un vignoble de l’Oregon en biodynamie.
Jancis Robinson est peut être moins connue, mais pas moins talentueuse. Journaliste et écrivain de littérature œnophile, elle est à l’origine de plusieurs ouvrages dont ”Oxford Companion to Wine” et “L’Atlas Mondial du vin”. De plus, elle est aussi conseillère officielle de la cave de la reine Elizabeth II d’Angleterre. Rien que ça.

Les spécificités de la biodynamie
Comme dit précédemment, l’une des grandes spécificités de ce mode cultural est la prise en compte du cycle lunaire (lune montante, jour feuilles, jour racines,…). Mais il n’y pas que cela, les vinifications ainsi que le recours à des pulvérisations à base de plantes, en passant par des préparations afin de solidifier la vigne, sont de la partie.
En vinification, certaines pratiques telles que les soutirages, la filtration ou encore la mise en bouteille, ne sont réalisés qu’en lune descendante, car elle est prétendue favoriser l’expression aromatique du vin. Vous l’aurez compris, le cycle lunaire guide les vignerons dans l’approche qu’ils ont de leur métier. L’utilisation du soufre est par ailleurs moindre par rapport aux vinifications biologiques.
Dans les vignes, c’est le même raisonnement. Depuis 50 ans, les expérimentations menées par Maria THUN ont permis de constater que les influences cosmiques sur la croissance des plantes semblent liées aux positions de la lune, du soleil et des planètes par rapport aux constellations.
Plusieurs actions sont ainsi menées par les vigneron(ne)s :
- Les préparations : Le compost de bouse soutient et renforce le processus de décomposition de la terre. Il contient tous les éléments nécessaire pour la vie du sol, il peut s’employer plusieurs fois dans l’année. Il est préférable de l‘appliquer un jour racine en période de lune descendante.La préparation 500, bouse de corne qui agit sur la plante. Elle renforce la vie souterraine en agissant sur le système racinaire de la vigne. Les racines deviennent plus allongées, plus denses, mieux réparties dans le sol.Mais qu’est ce qu’une bouse de corne ? Il faut introduire de la bouse de vache dans une corne de vache, puis vous l’enterrez pendant l’hiver (elle va fermenter) et la ressortez au printemps. S’ensuit alors une dynamisation en mélangeant de l’eau de pluie avec la bouse de corne fraîchement sortie. Le tout est ensuite pulvérisé dans les vignes.La préparation 501, silice de corne qui aide au développement des feuilles, de l’énergie et au bon équilibre de la fleur, nécessaire à une bonne fructification. Elle s’utilise pendant la période estivale, elle est donc complémentaire de la préparation 500.D’autres préparations sont élaborées à partir d’Achillée, de Camomille, d’Ortie, d’Écorce de chêne, de Pissenlit, de Valériane les transformant en humus aux qualités particulières. Le vigneron prépare ses purins de plantes et les pulvérise sur la vigne pour renforcer sa vigueur, lui permettre de mieux résister aux attaques des maladies (mildiou, oïdium,..) ou du gel.
- Si l’équilibre semble atteint, la plante se défendra seule. Cependant, les vigneron(ne)s doivent parfois intervenir pour aider la plante avec des tisanes, décoctions ou dilutions homéopathiques de plantes.
- Travail du sol : Il favorise l’installation des processus de vie en travaillant le sol à des moments différents de l’année, du mois ou de la journée (labours, griffonnages,…). Bien évidemment, les travaux à effectuer dépendent de l’appréciation du vigneron, qui connait sa terre mieux que personne!

Autant vous dire qu’un(e) vigneron(ne) travaillant en Biodynamie se doit d’être très rigoureux(se) car cela demande un immense investissement. Suivre le calendrier lunaire, réaliser les préparations (qui sont simplifiées dans cet article), les travaux du sol… demandent des connaissances supplémentaires et de la main d’oeuvre, tout en réalisant les missions “basiques” du métier.
À savoir : Certains domaines n’affichent pas la mention “Agriculture Biodynamique” sur leurs étiquettes, se refusant à l’employer comme un argument commercial. On comprend aisément que pour ces hommes et ces femmes, la biodynamie est plus une conviction qu’un moyen de vendre.
Quizz : Quels sont les 2 labels représentant la biodynamie ? La réponse est ici.
Quelques domaines en Biodynamie
Je vous conseille quelques domaines que j’ai apprécié :
Domaine Huet : fondé en 1928 par Victor Huet et son fils Gaston, le domaine compte aujourd’hui 30 hectares du cépage Chenin planté sur trois parcelles : le Haut-Lieu, le Mont et Clos du Bourg. Le domaine fut l’un des précurseurs de la culture biodynamique dans le vignoble français. C’est notamment l’un des domaines incontournables de la vallée de la Loire.
Domaine Zind-Humbrecht : Une belle histoire qui commença dès le XVIIe siècle pour ce domaine de 40 hectares situé en Alsace. Le savoir-faire ancestral de cette famille se transmet de génération en génération, permettant la naissance de grands vins. Ces derniers sont issus d’une dizaine de terroirs, conférant une palette aromatique très diversifiée.
Domaine de Montirius : Domaine de 58 hectares en Biodynamie depuis 1996, suite à leur rencontre avec François Bouchet (vigneron en Biodynamie depuis 50 ans), et pionnier de cette pratique sur les appellations Vacqueyras et Gigondas. En 1999, leurs vins sont alors issus de raisins de l’agriculture Biodynamique. Le domaine est certifié Biologique par Ecocert et Biodynamique par Biodyvin.
Le saviez-vous ? la Romanée-Conti, ce qui est considéré comme le meilleur vin de Bourgogne et un des meilleurs vins au « monde », est en biodynamie depuis 2007.
En vous souhaitant de futures belles dégustations…
À bientôt

Sources :
https://www.vinibee.com/biodynamie/
http://lesgrappes.leparisien.fr/vin-biodynamie/
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