Hors-Série : Un pas dans le monde du Whisky

Le Whisky chez les Écossais, le Whiskey chez les Irlandais…

Quel que soit votre camp, je vais tenter d’éclaircir un monde un peu moins connu des français en général.

Les premières distillations nous viennent tout droit de l’Egypte, 3000 ans avant J.C. En ces temps lointains, la distillation ne servait pas a produire des boissons mais plutôt des cosmétiques comme du parfum ou du fard à paupières (Al Kohl en arabe). Apparu au Moyen-Âge, le mot Alcool en serait par ailleurs un dérivé.

Le philosophe Aristote a été le premier à mentionner l’Alambic, l’outil permettant de distiller le whisky, en 384 avant J.C. Il a par ailleurs décrit le phénomène naturelle d’évaporation pour la première fois.

Ce sont ensuite les moines qui ont introduit la distillation en même temps que le christianisme aux IVe et Ve siècle en Irlande. En 432, des missionnaires avec en tête de peloton un certain Saint Patrick, auraient ramené avec eux la technique de la distillation ainsi qu’un Alambic, bien connu dans les pays arabes. D’après l’histoire, Saint Patrick serait d’abord venu en Irlande puis en Ecosse, les irlandais clament alors la paternité du Whiskey. Les Ecossais quant à eux, répondent en affirmant que Saint Patrick était natif d’Ecosse. Entre ces deux pays, les débats peuvent être parfois houleux concernant l’invention du whisky.

Les monastères, comme on a pu le voir avec le vin dans d’autres articles, n’ont cessé d’améliorer les innovations venant à eux, la distillation ne faisant pas exception.

Pendant ce temps au VIIIe siècle, les arabes améliorèrent eux aussi le processus, le premier vin a été distillé puis, au IXe siècle, le mot Alambic apparaît pour la première fois dans un écrit.

Mais ce n’est qu’au XIe et XIIe siècle que l’on commence à produire des boissons à partir de raisins, de légumes, de céréales ou encore de fruits. La première aqua vitae (eau-de-vie) était née !

Mais il ne faut pas s’imaginer que cette eau-de-vie, du nom d’Uisge Beatha en gaëlique, ressemblait aux whisky d’aujourd’hui, il n’en ai rien. A l’époque, elle était utilisée au niveau médicinale comme une sorte d’antibiotique, ou contre les empoisonnements alimentaires et paralysies. Les patients étaient amenés à boire de cet elixir pour se sentir mieux, et dès le plus jeune âge. Il se pourrait que cela explique qu’on utilise le même mot et ce, dans toutes les langues, quand on trinque : Santé !

Au XIIe siècle, les anglais conquièrent l’Irlande et s’intéressent de plus près à cette boisson très prisée de la population locale. Incapable de prononcer le nom de ladite boisson, les anglais le transforment petit à petit : uisge, fuisce, uiskie, whiskie et enfin whisky.

Le XIVe siècle marque une renaissance au niveau de la distillation. En effet, pendant que l’Italie émerge grâce à ces artistes, la peste noire frappa l’Europe mais aussi l’Afrique sub-saharienne, le Moyen-Orient, l’Asie ainsi que le Maghreb. Cette peste est l’une des plus meurtrières que le monde ait connu, en Europe par exemple, 30 à 50% de la population perdirent la vie suite à ses symptômes. La maladie a forcé les érudits a sans cesse progresser dans le domaine des soins avec de nouveaux traitements et médicaments, passant par l’amélioration des techniques de distillations. Les Alambics ont été autorisé dans les monastères et de plus en plus de moines s’essayèrent aux principes de distillation.

En 1494 a lieu la première distillation officielle, Friar John Cor de l’abbaye Lindores Abbey dans le Fife a reçu une commission du roi Jacques IV pour fabriquer de l’eau-de-vie : “8 bolls of malt to Friar John Cor, by order of the King to make aqua vitae”, message de la part de “L’Exchequer”, qui n’est autre que le trésorier royal. On obtient alors le premier whisky, très brut et non vieilli, contrairement à aujourd’hui.

L’accession au trône d’Henry VIII (1509) entraîna la dissolution des monastères, qui a pour conséquence une reconversion de certains moines. Ces derniers maîtrisant l’alambic et les techniques de distillation vont vivre de cette eau-de-vie. Ils vont en améliorer le goût ainsi que l’expérience de dégustation.

Au cours du XVIe siècle, le whisky devient de plus en plus consommé et est produit de plus en plus par ces “artisans maisons”. Le transport a joué un rôle dans cette élaboration puisque les producteurs ont commencé a réutiliser des fûts de Sherry (vin fortifié espagnol). Ces vins, très prisés par l’aristocratie de l’époque, étaient importés au Royaume-Uni et les fûts, une fois vidés, étaient laissés à l’abandon. Les producteurs ont alors la sage idée de les réquisitionner pour le transport, puis ils ont découvert que le whisky s’imprégna de notes boisées transmis par le fût. On commence alors par vieillir en fût certains whisky pour en changer le goût et la complexité.

En 1608, le comté d’Antrim en Irlande du Nord obtient la première licence officielle de distillation avec Bushmills.

(Distillerie de Bushmills : elle existe toujours aujourd’hui, ce qui en fait la dernière encore en activité en Irlande du Nord et la plus vieille du monde !)

Dès 1644 et encore aujourd’hui, le gouvernement n’a cessé d’imposer des taxes et réformes afin de limiter la distillation clandestine. En effet, le succès du whisky attira bon nombre de personnes et ces dernières se lancèrent dans ce business en devenant des distillateurs illégaux. De violents conflits ont eu lieu entre eux et les percepteurs royaux. Une legislation concernant la taille minimal des alambics utilisés a vu le jour mais malheureusement pour le gouvernement, elle a poussé de plus en plus de personnes à entrer dans ce business de manière illégale. Il faut savoir que jusque dans les années 1820, 50% des whiskies consommés en Ecosse étaient produit illégalement. La distillation illicite a duré environ 150 ans.

En 1828, un nouvel alambic fait son apparition : le Column Still (Alambic à colonne). Créée par un écossais, cet appareil permet au moût d’être distillé en continu. Il améliora le système mais, n’ayant pas les fonds nécessaire pour la commercialisation, il doit abandonner l’idée.

Et c’est a ce moment là qu’un percepteur du nom de Aeneas Coffey va saisir l’opportunité. Il reprend l’idée mais en y ajoutant des étages dans l’alambic afin que le moût y circule plus longtemps et se charge plus en alcool. Il a tout simplement conçu l’alambic d’aujourd’hui qui est notamment plus rentable économiquement avec une distillation continue.

En 1853, le premier Blended Whisky fait son apparition en Ecosse (merci Monsieur Usher) et cette arrivée va changer la face du marché. Son gout moins typé plaît aux palais et devient par conséquent plus recherché. Grâce aux dernières techniques utilisées, les produits sont de plus en plus qualitatifs et correspondent davantage au marché.

Puis, un tournant dans l’histoire du whisky survient lors de la crise phylloxérique touchant le monde du vin et le cognac. Le monde du whisky envahit le marché, notamment avec ces nouveaux blends : il remplit les caves et s’installe comme l’un des alcools les plus appréciés.

En 1890, une crise du nom “crise de Patisson” a vu deux frères négociants de whisky faire chuter le marché : ils achetaient des volumes considérable à crédit, si bien que les distilleries ont pour beaucoup augmenté leur capacité de production. L’offre dépassant la demande et n’arrivant plus a écouler les stocks car la qualité de leurs blends était devenu médiocre, ils font chuter le marché. Plus de 80% des distilleries ont subies cette chute en fermant leurs portes.

Et malgré cela, ainsi que deux guerres mondiales et une prohibition aux Etats Unis (1920-1933) rendant difficile et illégal l’importation de whiskies étrangers (Écossais, Irlandais,…) mais aussi la production des bourbons, le whisky a su durablement s’installé sur nos tables. Concernant la France, c’est l’après guerre qui, ouvrant les frontières, a permis au whisky de s’implémenté sur le marché. Le Bourbon a eu aussi du succès grâce aux productions américaines (western) même si a l’époque des cow boys, on était loin du personnage charismatique savourant son verre car le whisky était plutôt un tord boyaux.

En 1980, le whisky connait un nouvel essor avec la réapparition des single malt, oubliés depuis le XIXe siècle et l’avènement des blends. Ces années sont précieuses car elles vont totalement démocratiser le whisky : diversification des produits (blends, single malt…), augmentation des exportations, une publicité de plus en plus autorisée…

Aujourd’hui, les distilleries sont capables de créer des whiskies pouvant ravir tous les palais, même les plus difficiles. Le marché est par ailleurs en croissance dans notre pays. De nouveaux acteurs prennent également place sur la scène comme le Japon, la France, l’Allemagne ou encore l’Autriche. Le monde du whisky n’a pas fini de nous surprendre avec de futures belles dégustations…